Photo de la salle forum plateformes en commun 2022

DÉCLARATION FINALE
du 3eme FORUM DES PLATEFORMES COOPÉRATIVES

20 septembre 2022 - PARIS

Depuis l’explosion des usages du numérique au tournant des années 1990, nous avons assisté à la constitution rapide et profonde de grandes plateformes capitalistes qui ont massivement détruit ou abîmé des institutions sociales au cœur de nos vies : le travail, la culture, la communication, la solidarité etc. La constitution de bases de données personnelles gigantesques aux mains des acteurs privés, phénomène radicalement nouveau dans l’histoire de l’humanité, est également un risque fondamental pour nos libertés et nos systèmes politiques. Enfin, la numérisation croissante des activités humaines augmente l’impact écologique de celles-ci.

Les États ne parviennent pas à réguler de façon efficace ces plateformes. Leur puissance financière et leurs modes opératoires internationaux rendent difficile leur encadrement. Du côté de la société civile, force est également de constater que les initiatives pour créer des plateformes numériques alternatives, comme le sont, par exemple, Wikipédia, Open Street Map, Framasoft ou Mobicoop et les autres plateformes signataires et, avant eux Globenet, Gandi, SPIP, Indymedia, etc. ne parviennent pas à emmener suffisamment d’utilisateurs pour s’ériger en contrepoids aux plateformes dominantes.

Dans ce contexte, nous, plateformes numériques alternatives réunies en Forum le 20 septembre 2022 à Paris, déclarons :
1/ que nous continuons à refuser le monopole numérique de fait exercé par les grandes plateformes capitalistes et entendons agir pour préserver une diversité d’acteurs au sein du monde numérique par une stratégie d’alliance entre plateformes agissant pour un numérique d’intérêt général et porteuses d’innovation sociale ;

2/ que nous nous emploierons dans les mois qui viennent à établir un premier périmètre pour notre alliance. Nous appelons tous les acteurs souhaitant que vive un monde numérique alternatif aux grandes plateformes à nous rejoindre et notamment : les plateformes coopératives, les communautés du logiciel libre, les tiers-lieux, les communs numériques, les collectivités territoriales, l’État et l’Union européenne, l’enseignement et de la recherche, l’éducation populaire, les mutuelles, les associations, les coopératives ;

3/ que nous travaillerons à l’écriture d’un récit commun minimal ainsi qu’à la description d’objectifs communs de moyen et long terme. Parmi ceux-ci :

• nous devons absolument atteindre la masse critique d’utilisateurs qui nous permettra d’opérer des services offrant une qualité comparable à celle des grandes plateformes. A cette fin, toutes les hypothèses doivent être étudiées et notamment celle de constituer une fédération d’identités numériques des acteurs de l’alliance ;
• nous engageons des actions de sensibilisation et ouvrons un dialogue avec les acteurs publics afin qu’ils prennent leurs responsabilités en adoptant des politiques publiques anti-monopoles et une fiscalité juste. Elles doivent soutenir les plateformes d’intérêt général que nous opérons et qui doivent être reconnues. Il est urgent que les acteurs publics déploient des services publics numériques à destination des citoyen.ne.s. Ici, il nous faudra travailler à l’articulation des échelles territoriales (territoire / région/ état / Europe) et les grands plans publics d’investissement, tels le PIA, devront pouvoir être mobilisés ;
• la question de la sobriété numérique doit être posée. Trop souvent, le numérique est vu comme diminuant l’impact écologique des activités humaines. Ce n’est pas le cas et une réflexion de fond s’impose ici ;
• enfin, nous soulignons l’extrême importance de doter l’Europe d’une véritable souveraineté numérique. Nos organisations elles-mêmes, comme toutes les organisations européennes, dépendent trop fortement des technologies et services numériques sur lesquels les utilisateurs européens n’ont aucune emprise. Cette souveraineté numérique devra permettre de faire exister un numérique conforme aux valeurs démocratiques et de justice sociale et écologique de l’Europe sous le contrôle des citoyens, selon des modalités à définir.

4/ afin que notre alliance puisse atteindre ses objectifs, nous nous engageons à mutualiser des ressources :
• du temps de travail de nos collaborateurs pour participer à la rédaction d’une Charte établissant le périmètre de notre alliance, notre récit commun et nos objectifs détaillés ;
• des capacités de plaidoyer auprès des acteurs publics ; 
• des ressources informatiques ; 
• des compétences clefs autour du financement et de nos richesses humaines notamment ; 
• des actions de communication croisée.

Nous avons derrière nous trente années d’action en faveur d’un numérique plus ouvert, plus démocratique, social et écologique. Ces trente années nous ont montré à quel point les forces du marché sont puissantes et efficaces pour structurer un monde numérique à leur image. Mais la radicalité de la crise écologique a ouvert une brèche et la conscience chaque jour plus aiguë de nos concitoyen.ne.s de la nécessité de mener une transition incluant le monde numérique doivent nous conduire à renforcer et structurer notre action.

Nous vous appelons à nous rejoindre
en apposant votre signature et celle de votre organisation  :

Bastien Sibille, Mobicoop

Pierre-Yves Gosset, Framasoft

Rémy Gerbet, Wikimédia France

Florian Perret, Plateformes en Communs

Rachel Arnould, Open Food Network

Bérengère Batiot, CoopCircuits

Arnaud Delcasse, CoopGo

Mohammed Sifaoui, TËNK

Fatima Bellaredj, Confédération générale des Scop et des Scic

Alexandre Bigot-Verdier, POP Café

Corinne Vercher-Chaptal, Université Sorbonne Paris Nord

Mélissa Boudes, Institut Mines-Télécom Business School

Benjamin Jean, inno3

Vincent Bachelet, Université Paris-Saclay

Michel Jaquet, Commonly

Christophe Besson-Léaud, ALLIANCE SENS & ÉCONOMIE 

Sébastien Plihon, La Compagnie des Tiers-Lieux

Anaïs Persuy

Magali Roger

Sylvie Carpentier

Julie Bernard