Newsletter #23

Il est des moments où il ne s’agit pas de mollir face aux périls. La Coop des Communs s’engage sans hésiter pour que, lors des prochaines élections législatives, la peur et le ressentiment ne gagnent pas encore du terrain. Mais au moment où se produit ce séisme, il nous faut également nous demander : comment avons-nous pu en arriver là ?

Nous pensons que la démocratie ne se réduit pas à se mobiliser lors des échéances électorales. Notre ligne d’action est simple : la démocratie vit et se nourrit au quotidien des engagements des citoyens. Les communs sont une excellente façon de permettre aux personnes concernées de faire émerger et faire vivre des réponses pour satisfaire leurs besoins, de faire société à tous les niveaux. Nous le voyons tous les jours, les frustrations et les besoins individuels et collectifs vont grandissant.
Pendant que certain.es cherchent à exacerber les différences pour nourrir les tensions sociales et en profiter, d’autres recherchent ce qui fait commun pour le protéger collectivement et le promouvoir.
Nous avons eu, chaque jour de la semaine qui vient de s’écouler pour La Coop des Communs, des exemples et démonstrations de ce que sont et font les communs, à l’occasion de :
– la présentation de notre ouvrage collectif sur les « communs de proximité »,
– notre rencontre sur « Communs, Gouvernance territoriale et accès aux ressources naturelles »,
– le point d’étape du groupe sur la comptabilité C.A.R.E.,
– nos interventions au Congrès anniversaire des 10 ans de la loi ESS sur « la conception et le partage de la valeur », sur la gouvernance des données dans les projets de recherche participative à Montpellier et, enfin, sur l’éducation « lorsque les conditions de vie et d’épanouissement des générations futures ».

En libérant les pratiques, les communs ouvrent les capacités de faire ensemble, permettent de découvrir l’altérité dans sa richesse et sa complexité, de construire ensemble une information commune, dans des espaces de médiation et de négociation du terrain vers le national et l’international. Ils donnent un espoir en travaillant la société civile en profondeur. Au-delà des incantations, ceux qui pratiquent le savent : la transformation vient des gens, de la confiance qu’ils peuvent avoir dans les institutions qu’ils créent et contrôlent (« lorsqu’ils possèdent l’autonomie nécessaire pour élaborer leurs propres institutions et sont en mesure d’influencer les normes et bénéfices perçus », Ostrom, 1990). En tout cas, la transformation ne se fera pas sans eux.
Notre projet politique et associatif se nourrit de cette radicalité.

Plusieurs propositions visent à renforcer tantôt des « communs numériques » utiles pour les administrations publiques ou des « appels à communs », tantôt des « communs administratifs » voire un « ordo-communalisme » de l’État ou encore un « Etat en réseau » en faveur des communs. On gagnerait à les verser au débat au regard d’un axe essentiel : leurs avantages et inconvénients pour la capacité des personnes concernées d’agir sur leur vie, de lutter contre le sentiment de déclassement, et donc bâtir les construits sociaux qui articulent leurs droits et leurs obligations, individuels et collectifs. Dans un apprentissage parfois rude mais riche de la démocratie au quotidien, il s’agit, en un mot, de notre capacité à (re)créer du mouvement social et de la dignité humaine.

Sans attendre le travail collectif sur la diversité des « courants des communs » que nous mènerons cet été, nous présumons déjà d’une chose : la solution proviendra d’abord de notre exigence collective, dans le temps long, à exercer notre pouvoir d’agir sur notre vie et de contrôle, y compris vis-à-vis de l’Etat, notre « devoir de vigilance », en plaçant la lucidité, le désir d’utilité sociale, contre les peurs de l’étranger, au cœur de notre volonté d’agir en commun.